Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ? [PV Requiem]

Pendant des années, ma mère m'a fait tout un foin en me demandant à chaque fois ce que je voulais faire comme métier, que je devais choisir rapidement pour savoir quoi faire comme études, qu'elle n'allait pas m'héberger jusqu'à mes quarante ans etc. La meilleure, c'est que, quand je lui ai dit que je voulais devenir policier, elle est restée la bouche grand ouverte pendant deux bonnes minutes... Puis s'était mise à me faire la morale :

« Nate !! Tu peux pas faire ça ! Tu t'imagines que tu vas risquer ta vie tous les jours ? Et moi je vais me faire un sang d'encre dès que je saurais que tu es en pleine poursuite ou je ne sais quoi ! »

Oui bon, je n'entrais pas non plus dans la police de New-York... En plus de ça, ma mère avait une phobie des armes, je n'ai jamais compris pourquoi. Bref, avec ma mère, tout est toujours exagéré. Il suffisait d'avoir l'habitude, comme moi, pour ne pas être déstabilisé... Tout ça pour dire que je ne l'avais pas écouté et que j'étais aujourd'hui devenu policier, comme je l'avais prévu. J'étais en ce moment derrière le comptoir du commissariat, bricolant dans des papiers tout en écoutant d'une oreille distraite ce qui se disait à côté de moi. Je n'étais pas du tout du genre commère, comme certaines filles du quartier, mais j'aimais juste savoir ce qui se passait autour de moi. Curieux ? Moi ? Mais non, mais non. Et alors que je trais les petits papiers, essayant de ne pas m'embrouiller avec les gens qui avaient eut la merveilleuse idée d'avoir le même nom de famille - oui je sais, c'est pas de leur faute mais ça m'énerve quand même -, j'entendis une voix féminine que je ne connaissais que trop bien. Je le relevais la tête et reconnut le visage de ma meilleure amie : Requiem.

« Hum... dis donc, tu veux pas que je te demande un appart' au-dessus du commissariat par hasard ? C'est ta deuxième maison non ? »

J'affichai un léger sourire puis me levai de mon siège pour lui dire bonjour. Non mais vraiment, Requiem passait sa vie au commissariat ! Même les multirécidivistes ne venaient pas autant qu'elle ! Mais d'un côté, ça ne me dérangeait pas. Vu que nous étions meilleurs amis, il y avait une vraie complicité entre nous, au point qu'avec un simple regard, il nous arrivait parfois d'éclater de rire sans raison apparente.

Nathaniel et Requiem - Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ?

Parfois, il m'arrivait de m'ennuyer. Comme tout le monde. Assise dans le sofa de la maison familiale, j'avais vu mon frère et ma sœur sortir pour quitter la demeure et me laisser ainsi seule pour la journée. Dès lors, le silence s'était emparé de la situation, entrainant dans mon esprit une réflexion intense sur l'occupation qui allait pouvoir me distraire l'espace de quelques heures. Scrutant la pièce, comme à la recherche de quelque chose, je laissais mon regard se poser sur ma main gauche, où stagnait une vulgaire bague en plastique. J'aurais très bien pût retirer cette anneau de mon annulaire mais, je ne l'avais pas fait. Allez savoir pourquoi. Quoi qu'il en soit, un simple regard sur ce bijou de fortune m'avait suffit pour penser à Nathaniel et m'avait suffit pour me détacher précipitamment de l'emprise du sofa. Il était la seule personne qui ne m'en voudrait jamais de me voir débarquer à ses côtés, n'importe où et n'importe quand, et, de plus, je savais parfaitement où le trouver à cet instant donné.

C'est donc d'un pas enjoué que je me dirigeais, comme si cela était naturel, vers le commissariat. Les regards se posaient sur moi, sans doute curieux de savoir ce qui m'amenait dans ce genre de lieu. Avais-je commis un crime ? Venais-je dénoncer quelqu'un ? Après tout, ces possibilités se chamboulaient peut-être dans l'esprit des passants, mais je m'en fichais éperdument. La seule et unique raison qui me poussait à franchir cette porte n'était autre que Nate. Dès la première seconde où mes talons claquèrent sur le carrelage clair du commissariat, les regards des policiers se tournèrent vers moi avant qu'ils ne voient leurs visages s'orner de magnifiques sourires. Ils n'étaient sans doute que trop habitués à me voir arriver sans aucune raison précise. Prenant la peine de les saluer d'un signe de tête furtif, je me dirigeais déjà vers le bureau principal derrière lequel était assis Nathaniel, la tête dans la paperasse.

« C'est que ça travaille dur ici. »

Rapidement, il se leva pour me faire la bise, sans aucune surprise de me voir ici. Il ajouta même, sur un ton ironique, si je ne voulais pas me procurer un appartement au dessus de l'établissement. D'un regard malin, je rentra dans son jeu, sans plus attendre. Après tout, c'était toujours comme ça. Nous avions vingt-trois ans mais, au final, quand nous étions tout deux ensemble, notre côté enfantin se réveillait.

« Quelle charmante attention. J'aurais cru que tu allais me proposer une cellule mais... Un appart', c'est cent fois mieux tu sais. Enfin, si tu n'as pas peur que je réveille les prisonniers en pleine nuit, juste car je fais trop de bruit à l'étage du dessus, tu peux me l'acheter cet appart. Tu auras même le droit de venir y dormir de temps en temps. »

L'histoire de ces deux anneaux qui étaient autour de nos doigts était assez étrange, mais totalement plausible aussi. Contrairement aux apparences, Requiem et moi n'étions pas mariés du tout, ou en tout cas, pas officiellement. Il avait juste suffit d'une soirée un peu trop arrosée et hop ! Le mariage bidon arrive dans nos vies ! Cette bague, je la voyais parfois sans la voir, parfois je m'y attardais en me demandant à moi-même pourquoi je n'ai jamais pensé à l'enlever, et pourquoi quand j'y pensais je ne le faisais pas. Mais aujourd'hui, je n'avais pas vraiment eut le temps de regarder quoi que ce soit sur moi ! Déjà que ce foutu réveil n'avait pas sonné à l'heure, me faisant arriver ici avec dix minutes de retard, puis tous ces gens qui ne savent pas se tenir tranquille et ne font que voler ou porter plaintes et qui ont tous les mêmes noms de famille - allez savoir pourquoi... Si ça se trouve, y'a un gang dans le coin ! - bref, la journée avait plutôt mal commencée. Finalement, après un bon café bien remonté, ça c'était passé relativement vite...

J'étais plongé dans ces fameux papiers quand la voix de Requiem vint me sortir de ma concentration. Je n'essayais pas de l'ignorer, premièrement parce que si j'essayais, elle trouverait bien un moyen pour me faire arrêter et deuxièmement car je n'en avais pas envie. Je m'étais alors levé de ma chaise pour lui faire la bise, puis elle rentra dans mon petite jeu. À force de venir tout le temps sans raison, elle finirait sûrement pas devenir amie avec tout le commissariat !

« La cellule c'est pas mal non plus tu sais... » Je la regardai avec un petit sourire en coin puis repris presque tout de suite : « Cool ! Ça m'évitera d'être en retard comme ça. »

Cette fois-ci, je lui fis un clin d'œil. Puis, heureux d'avoir trouvé quelqu'un qui pourrait me libéré de mes plaintes et mes détentions, je sortais de derrière le comptoir et m'approchait de ma meilleure amie, m'accoudant sur le bureau que je venais de quitter.

« Alors, qu'est-ce qui t'amènes ? »

Quelques regards de policiers qui s'ennuyaient ferme se posèrent sur nous, juste histoire de voir ce qu'il se passait ou se disait. Finalement, peut-être qu'eux adorent encore plus que moi savoir tout sur tout... D'autant plus qu'avec Requiem, il nous arrivait parfois de partir dans un délire tous les deux, s'inventant une histoire improvisée et que quelques personnes allaient répéter aux autres alors que c'était du flan. Ça c'était le côté que personne ne pouvait comprendre réellement à part nous : le côté "toujours enfant" qui réside en nous.

Nathaniel et Requiem - Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ?

« Requiem, t'es mariée ? C'est quoi cette bague ? »

Je me souviens encore de la réaction de mon jeune frère le jour où je suis rentrée avec cette fameuse bague au doigt. Certes, il y avait de quoi se poser des questions mais, lors des vrais mariages, les anneaux ont généralement plus de valeur que ce simple cercle de plastique alors, je ne voyais guère la raison de ces questionnements intempestifs. « Non... Je me suis juste saoulé... Enfin, je crois. » Oui, c'était la vérité. J'avais passé une soirée arrosée avec Nate ou du moins, c'était ce que nous avions conclu de l'histoire puisque ni lui, ni moi, ne nous souvenions de ce qu'il s'était passé avant et pendant ce soit disant mariage. Quoi qu'il en soit, jamais nous ne nous étions vraiment questionné sur cela et avions tout deux gardé cette bague, comme si au final, elle était devenu un simple bijou, une partie de nous. Les jours passants, je finissais même par me dire que cette anneau représentait en quelque sorte notre amitié. Certains se partageaient bien un pendentif en forme de cœur divisé en deux alors, pourquoi ne pas symboliser un lien aussi fort et beau que l'amitié par un autre bijou ?

Et quelle amitié. Nathaniel et moi nous connaissions depuis un bon nombre d'années déjà et, dès la première conversation, dès le premier échange de regard, cette complicité s'était installée. Nous avions la même vision du monde, les mêmes envies, les mêmes délires. Tout simplement. Tout ce qui se ressemble s'assemble, c'était bien connu et, ce dicton n'avait pas fait erreur avec nos deux personnes. Parfois, il nous arrivait même de finir la nuit dans le même lit. Bon, d'accord, souvent. Mais, pour nous ce n'était qu'un jeu, une manière de nous amuser à notre façon, comme nous arrivions aussi à nous détendre à travers un simple échange de parole, comme aujourd'hui.

« Mais je ne suis pas une criminelle voyons... Puis, si tu me mettais derrière les barreaux, tu m'entendrais crier tout la journée pour que toi où un de tes charmant collègue vienne me secourir. »

Il s'approcha alors de moi, quittant son bureau et les papiers qui y trônaient. Nous avions déjà tout deux un magnifique sourire sur nos visages, comme à chacune des fois ou nous nous voyions. Nate était en quelque sorte comme mon rayon de soleil, comme je me permettais de le surnommer de temps à autre. Le seul et l'unique être capable de me faire rire et de me faire oublier le moindre de mes soucis. Écoutant alors la fameuse question qu'il avait à me poser, je m'approcha de lui et déposa mes bras autour de son cou. Simple et banal jeu.

« Ais-je réellement besoin d'une raison particulière pour vouloir te voir ? »

Je parle souvent de ma mère, c'est vrai, mais il faut avouer que c'est un cas ! Ce qui est sûr c'est que si vous venez chez nous, vous n'allez pas vous ennuyer ! Et Requiem en a déjà fait l'expérience. Elle a eu la chance - ou la malchance - de goûter aux inquiétudes perpétuelles de ma mère en ce qui me concerne. Au début, j'en avais honte, maintenant j'ai l'habitude. Le jour où j'étais rentré à la maison, après la fameuse nuit avec Requiem, c'est limite si elle avait fait attention à la bague. Parce que ma mère avait maintenant enfin compris que je n'étais plus le premier de classe que j'étais avant, en tout cas plus totalement, et que je revenais souvent complètement ivre ou avec une fille au bras. Elle était également au courant pour ce que Requiem et moi faisions assez souvent. Je ne sais pas comment elle l'a su, mais elle le sait...

« À force de débarquer ici avec un grand sourire, ils vont finir par croire que tu me rackette, voire pire, à chaque fois que tu me vois, mes charmants collègues. »

J'affichai un nouveau petit sourire. C'était faux, bien sûr, et totalement inimaginable. Étrangement, le fait que je sois policier m'a permis d'apprendre à remarquer certains arnaqueurs pas très discrets dans leur attitude. Les autres savait que je saurais repérer ceux qui essayaient de m'avoir sous leur aile pour ne pas se retrouver en prison, et Requiem n'était pas du tout ce genre de personne, donc elle n'avait aucun soucis à se faire.

Je me levai de ma chaise pour venir de l'autre côté de bureau et me tenir bien face à ma meilleure amie. Lorsqu'elle passa ses bras autour de mon cou, ça ne me déstabilisa absolument pas, contrairement à ce que ça aurait pu me faire si nous n'étions pas aussi proches. Avec un ton calme et posé, faisant un peu mon innocent, je lui répondis :

« Hum... Pas vraiment non... Sauf si tu te sens seule et moi aussi... » Je lui souris et ajouta : « Donc tu as eu un flash comme ça comme te disais "Je veux aller voir Nate" ? Ou une petite voix. Tellement tu peux pas de passer de moi. »

Nathaniel et Requiem - Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ?

Nous nous connaissions parfaitement, plus personne ne pouvais le nier. Je savais tout de lui, il savais tout de moi. J'avais même déjà rencontré sa mère. Je sais pertinemment qu'il trouve qu'elle s'en fait trop pour lui mais, moi, je trouve plutôt ça attentionné. Une mère s'en fait toujours pour son enfant après tout. A l'inverse, il n'avait jamais pût rencontrer mes parents puisque ces derniers avaient perdu la vie avant que je ne fasse sa connaissance. Il était d'ailleurs une des rares personnes à être au courant pour cette partie de mon histoire. Quoi qu'il en soit, faute de mieux, il avait rencontré les deux autres têtes blondes de la famille, mon frère et ma sœur. Je me souviendrais d'ailleurs toujours de ce jour-là. Ma sœur le pensait drogué et ne voulait pas lui parler tandis que mon frère, qui était encore jeune à l'époque, était persuadé que nous allions nous marier et l'élever comme si c'était notre fils... Au fond, je me demande parfois d'où ils tiennent leurs sottises, me questionnant alors sur le fait que peut-être, mon père et ma mère avaient été quelque peu dérangés dans leur jeunesse. D'ailleurs, j'étais sans doute comme mes benjamins, quelque peu cinglée mais... je me le niais, pour moi ce n'était que de la rigolade, rien de plus.

« Réellement ? Si il savait que je faisais bien pire. Enfin. Un peu de présence féminine ne vous fait pas de mal messieurs. »

Les regards se posaient de plus en plus sur nous. Ce qui me faisait bien rire d'ailleurs. Une fois de plus, je m'étais adonnée à rentrer dans un petit jeu où, ma foi, je racontais un peu n'importe quoi, tout en sachant pertinemment que les policiers de ce commissariat avaient les oreilles qui trainaient partout. Ils écoutaient ce que nous disions. Ils écoutaient toujours nos conversations de toute manière, et ils devaient d'ailleurs se poser de magnifiques questions à mon sujet. Certains pensaient peut être même que ma place n'était pas dans un commissariat mais, dans un asile, allez savoir.

Toujours face à Nate, je l'écoutais parler, la malice dans le regard et un magnifique sourire sur le visage. Au fond... C'était bien la solitude qui m'avait poussé ici. La solitude mêlée à une pointe d'ennui.

« Mais je me sens toujours seule loin de toi Nate voyons, et je ne pourrais jamais me passer de toi. Ce pourquoi je viens toujours t'enquiquiner ici... Enfin, en réalité, tu peux dire merci à Clyde et Zepplin qui ont désertés la maison me laissant seule dans l'ennui. Voilà, c'est ça, je m'ennuyais alors, mon petit doigt ma dit que je pouvais venir ici pour m'occuper. »

Le jour où Requiem m'a annoncé que ses parents étaient décédés quand elle était encore jeune, je n'avais pas réellement su comment réagir. Est-ce que dans ce genre de situations, il fallait prendre la personne dans les bras, lui dire un simple "désolé" ou ne rien faire du tout ? C'était une question à laquelle je n'arrivais pas du tout à répondre. Pour finir, avec elle, j'avais opté pour la deuxième solution, vu que j'avais légèrement gaffé... Sur ce coup là, je m'étais senti parfaitement idiot... Je ne me souviens plus de ce que j'ai dis qui a abouti à cet aveu, mais en tout cas, c'est beaucoup mieux comme ça ! Sinon j'en aurais encore honte rien qu'à y repenser. Je retins un petit rire à ce qu'elle dit. C'est vrai qu'il n'y avait, dans ce commissariat, que des hommes. Quoiqu'il y avait tout de même deux femmes, peut-être trois, mais pas plus. De plus en plus de personnes qui étaient là, autour de nous, nous regardaient. C'était le genre de choses qui se produisait assez régulièrement quand j'étais avec Requiem, et c'était aussi le genre de moments durant lesquels nous prenions un pied immense à faire croire aux gens des choses totalement fausses !

« Mais tu sais que tu peux venir t'occuper quand tu veux... et comme tu veux. Aussi. »

Mes parents n'avaient jamais voulu d'autres enfants. Par conséquent, j'étais le seul et l'ultime qu'ils auraient. Autant vous dire que ça peut être bien comme moins bien. On a tous ce qui est cadeaux et tout le reste étant enfant, mais quand on grandit, on hésite absolument pas à inviter des amis à la maison pour éviter de se sentir seul. Et quand je suis seul chez moi le soir, que ma mère n'est pas encore rentrée et qu'il est trop tard pour inviter qui que ce soit, c'est le piano qui m'accueille. Ou parfois le lit de Requiem... Quoiqu'elle était la seule personne que j'osais appeler en pleine nuit parfois, quand je m'ennuyais ou que je n'arrivais pas du tout à dormir.

« Y'a même des papiers à trier si tu veux ! Tu verras, c'est marrant ! »

Je ris légèrement. On ne pouvait pas dire que le tri des papiers faisait réellement partie du travail le plus passionnant du policier. Même dans une grande ville où il y aurait de quoi faire.

Nathaniel et Requiem - Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ?

Je ne parlais que rarement de mes parents. Je n'aimais pas parler de mes parents... Leur décès m'avait grandement affecté, perdre père et mère le même jour n'est pas chose facile. On est aimé, entouré, comblé et puis, en une seconde, tout peut basculer. C'était ce qu'il s'était passé. Une dernière bise avant qu'ils ne partent en voyage loin de nous, un au-revoir enjoué qui, sans que nous ne le sachions encore, allait se terminer en un véritable adieu. C'était un soir, assez tard, que le téléphone avait retentit. Étant l'ainée, j'avais pris soin de décrocher avant d'entendre une voix inconnue, celle d'un policier, m'informant que mes parents avaient perdu la vie dans un grave accident de la route. Je ne sus que plus tard qu'en réalité, un camion n'avait pas prit soin de s'arrêter à un feu tricolore passé au rouge et que ce large véhicule avait finit sa course, encastrant la voiture de mes parents contre un bâtiment proche. Je ne m'en était jamais remise. Mais je le cachais. En tant qu'ainée de la famille, je me devais de montrer l'exemple et d'être présente pour mon frère et ma sœur. Je me devais de rester forte, pour eux. Après ce drame, trop jeunes pour nous assumer seuls, nous avions été placé chez notre tante, cette espèce d'alcoolique que je ne supportais pas le moins du monde. C'est ainsi que dès ma majorité, j'embarquais Zepplin et Clyde pour qu'on vivent tout les trois sous le même toit, loin de cette femme qui n'en avait sans doute rien à faire de nos trois personnes. Je m'efforçais, jours après jours, de m'occuper l'esprit, de me distraire. Sachant pertinemment que dès que l'occasion s'offrirait à moi, comme le soir, lorsque le silence et la solitude s'emparent de mon environnement proche, je repensais à eux, à mon passé.

« M'occuper comme je veux ? Hum, voilà qui est une très bonne idée. Tu n'aurais peut-être même pas dût me le dire. Qui sait de quoi je suis capable... »

Quelques raclements de gorges de la part des policiers et je compris que ma phrase pouvait être mal vue. Mais, après tout, ils étaient habitués à mes sous-entendus. Depuis le temps que je venais raconter tout et n'importe quoi ici, je finirais surement par demander une carte d'abonnement, ou alors, je deviendrai leur mascotte... qui sait. Quoi qu'il en soit, Nate me proposa une occupation. Trier les papiers. Bon, d'accord, je m'ennuyais ferme mais, il pouvais toujours rêver pour que je trie les papiers à sa place. Après tout, c'était son métier et, me connaissant, je ne ferais que mettre encore plus de désordre parmi ces diverses feuilles importantes.

« Ça c'est ton job coco. Pas le mien. Par contre, si l'un de vous veut un massage, je suis partante. »

Je parcouru alors la salle du regard, observant les autres policiers, comme pour leur faire comprendre que si l'un d'eux voulait un massage, je ne ferais qu'exercer mon métier. Puis, je reposa mes yeux clairs dans ceux de Nate. Oui, j'avais encore une autre bêtise à lui dire...

« D'ailleurs, tu peux me présenter aux prisonniers si tu veux, ça ne fera qu'agrandir ma clientèle et je suis prête à venir faire des massages ici. »

Mon père n'était pas mort. Juste parti de la maison après le divorce de mes parents. Et, bien que je n'avais que dix ans lorsque ça s'est produit, j'avais eu un immense soulagement à le voir quitter notre toit ! Son comportement avec moi et avec ma mère m'énervait profondément... Dès qu'il rentrait du travail, si quelque chose ne lui plaisait pas dans la maison, automatiquement c'était moi le responsable. Quand sa chemise n'était pas repassée, ma mère se prenait tout dans la tête, comme si c'était une question de vie ou de mort. Autant dire que quand le divorce a été proclamé, nous avons tous sauté de joie ! Enfin moi et ma mère surtout.

« Moi je sais. »

Aux quelques raclements de gorge que j'entendis, je tournai la tête avec un léger sourire sur les lèvres. C'est vrai que notre discussion devenait assez... privée. Mais ils devaient probablement avoir l'habitude. C'était comme ça presque à chaque fois que Requiem venait au commissariat ! À sa réponse concernant ma proposition de tri de papier, je me sentis obligé de faire un air de chien battu. Ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien ! C'était une sorte de réflexe...

Lorsque ses yeux se reposaient dans les miens, après qu'elle ait fait le tour du commissariat du regard pour voir si certains étaient intéressés par sa proposition, je m'attendais immédiatement à quelque chose d'étrange. Une autre proposition encore plus bizarre que la première. Et ça ne manqua pas ! Je connaissais Requiem tellement bien que j'étais même capable de savoir ce qu'un de ses regards voulait dire. Pour moi, c'est ça, connaître tout sur l'un et sur l'autre.

« Hum... Non, j'ai pas envie que tu meurs poignardée tu sais. L'espérance de vie dans les couloirs des cellules est de... trente secondes. Une minute au grand maximum. »

C'était encore une fois une exagération. Non seulement il n'y avait, logiquement, aucune arme quelconque dans les cellules, mais en plus de ça, les prisonniers qui y étaient n'avaient pas l'air de vouloir trop recommencer les actes qui les ont amenés ici. Bien qu'un ou deux meurtriers devaient traîner dans le coin...

Nathaniel et Requiem - Qu'est-ce que tu fais ENCORE là ?

Savoir de quoi j'étais capable... Il était bien un des seul. En réalité, aussi étrange que cela puisse paraître, je n'étais pas du genre à m'ouvrir facilement aux autres. Certes, cela ne me dérangeait guère de parler à un inconnu voire même, de finir dans le lit d'un homme dont je ne connaissais même pas le nom mais, pour rien au monde je ne me confiais à l'une de ces personnes. J'avais besoin d'avoir confiance en l'être me faisant face pour lui narrer mon passé, pour lui faire découvrir ma réelle personnalité. Et, même avec de l'alcool coulant à flot dans mes veines, je ne confiais point cette partie de moi, cachée dans les méandres de mon esprit. En réalité, je ne sais réellement ce qui m'avais poussé à donner cette fameuse confiance à Nate. Était-ce le temps ? Où était-ce tout simplement car il m'aimait tel que j'étais ? Non, je ne le savais pas. C'était peut-être dans le sang des Oakley au fond, puisque, il fallait bien l'avouer, sa mère n'avait pas mis grand temps avant de m'apprécier à ma juste valeur, ni même avant de me voir mariée à son cher fils...

« Qui t'as dit que tu connaissais toutes mes capacités très cher... »

Mourir dans les couloirs.... Cette réaction laissa un rire s'échapper de ma bouche. Il avait le don de me faire rire, oui. Après tout, les détenus ne devaient pas être si dangereux que ça, la ville recélant plus de fous que de tueurs. Il fallait l'avouer. Des boîtes aux lettres arrachées pas des conducteurs ayant trouvés leur permis au fond d'une pochette surprise, un sex-shop qui fait sans doute plus d'affaires que la boulangerie du coin, qui avait d'ailleurs des spécialités aux formes étranges. Ou bien, de voisins sonnant à votre porte pour vous demander si, par hasard, vous n'auriez pas le kama-sutra à leur prêter... Oui, dans cette ville, les sourire courtois étaient remplacés par des regards pervers, en manque. Et les voisines demandant, à l'origine du sucre ou de la farine venaient désormais demander des préservatifs ou des menottes. Vous voyez, rien de bien inquiétant. Aucun meurtre, aucun vol, aucun kidnapping.... Quoi que.

« Ton boulot presse vraiment ? Que dirais tu si je t'enlevais ? »

Le regard coquin, je n'avais pas d'idées précises en tête. Je voulais juste profiter d'être en sa compagnie... Après tout, c'était bien pour passer du temps avec lui que j'étais venue ici.

La première fois que ma mère avait lancé le sujet du mariage, j'étais chez moi, avec Requiem, tranquillement dans le salon et nous étions en train de rire de tout et n'importe quoi. Autant dire que ça avait jeté un beau froid dans la pièce quand elle en avait parlé. Je m'étais alors levé et avait pousser gentiment ma mère vers la sortie du salon, tout en prenant soin de dire un petit "oui oui maman on verra" et était revenu vers Requiem. Je ne sais pas pourquoi elle était tellement têtue sur ce point. D'accord elle adorait Requiem, mais de là à la voir directement comme sa belle-fille... Enfin mes réponses se résume toujours à un "oui on verra", comme ça je suis tranquille pendant un bout de temps. J'affichais finalement un petit sourire à ce qu'elle me dit et baisser la voix pour lui répondre.

« Il faudra que tu me montre ce que je ne sais pas encore alors. »

Bon d'accord j'avais exagéré un peu. Mais c'était voulu ! On ne peut pas dire qu'il y avait énormément de poursuites ou de meurtres dans la ville. Mais pourtant, on arrivait quand même à trouver quelques délinquants par-ci par-là. Mais aucun acte qui leur voudrait vingt ans de prison.

« Il a une tête à presser ? »

Je lui montrai d'un simple signe de tête la pile de papiers que j'étais en train de trier avant son arrivée. Il y en avait encore pas mal, mais j'avais quatre jours pour le faire - ordre du supérieur, oui mon capitaine ! - et aujourd'hui n'était que le premier. Alors ça pourrait bien attendre un peu. D'autant plus que ma pause arrivait à grandes enjambées.

« Je serais obligé de te mettre en garde à vue pour kidnapping... mais c'est d'accord ! J'te suis ! »

Je n'avais aucune idée de l'endroit où nous allions, peut-être qu'elle non plus d'ailleurs. Mais j'avais aussi envie de passer du temps avec elle, parce que je savais qu'il y avait de grandes chances pour que nous éclations de rire sans raison !